La belle histoire de la SLOE !
Première partie : ses 20 premières années
Par André Beauchesne et Lucie Roy
«La société ornithologique de l’Estrie a été incorporée en vertu de la loi des compagnies du Québec le 25 septembre 1981.» C’est ainsi que le fondateur de la Société de loisir ornithologique de l’Estrie (SLOE), André Cyr (voir autre texte : André Cyr, fondateur de la SLOE et passionné d’ornithologie depuis l’âge de 10 ans!), introduit le tout premier Mot du président dans Le Bulletin Ornithologique Estrien qui deviendra en 1983 Le Jaseur.
La SLOE fêtera bientôt ses 40 ans d’existence. Pour marquer le coup, pour se souvenir, racontons l’histoire de notre société! Ce qui frappe, dans ce retour aux racines de la SLOE, c’est combien la vision très inclusive de l’équipe de fondation, symbolisée par le choix du terme « société » influence encore les activités de la SLOE :
«Ce n’est pas un club en ce que certains pourraient ne pas se sentir la compétence nécessaire pour en faire partie. Au contraire, tous ont une place dans leur société, autant ceux qui veulent en apprendre depuis l’abc des oiseaux, que ceux qui n’ont pour intérêt que leur mangeoire de jardin, que les plus mordus de nos invétérés ornithologues.» (André Cyr, dans le Mot du président du même bulletin)
Les 10 premières années : créer une base solide
D’abord, quelques dates et faits mémorables qui ne manqueront pas de faire sourire les membres qui étaient là, aux premières loges de l’entrée en scène de la SLOE. Ils se rappellent qu’André Cyr se lance dans l’aventure fort de l’appui ferme de 60 membres et de 130 personnes se disant intéressées. Ces personnes sont issues de 35 localités de l’Estrie et d’ailleurs au Québec. Rapidement, au printemps 1982, elle compte 200 membres dont la cotisation est fixée à 10$ pour les membres réguliers, à 7$ pour les étudiants et à 18$ pour les familles. L’Estrie est la sixième région à se doter d’un organisme régional en ornithologie. La SLOE établit ses quartiers généraux dans le local 514 d’une vénérable institution, le Séminaire de Sherbrooke!
Dès le début, la SLOE se dote d’un moyen de communication afin de rejoindre et d’informer ses membres, celui-ci prend la forme d’un bulletin trimestriel. Rapidement, André Cyr lance un concours pour le choix d’un oiseau comme emblème de la société : le 4 juin 1982, le conseil d’administration désigne le Jaseur des cèdres, aujourd’hui le Jaseur d’Amérique. L’illustration de l’oiseau est créée par Christiane Girard de Chicoutimi qui devient le logo de la SLOE et se retrouve sur la page couverture du bulletin qui a désormais pour titre Le Jaseur. Un peu plus tard, en 1983, la SLOE inaugure sa première carte de membre et obtient le statut convoité d’organisme de bienfaisance enregistré, ce qui lui permet de remettre des reçus pour dons aux fins d’impôt.
Le besoin de fonds supplémentaires se fait sentir dès 1986. C’est l’occasion de lancer la vente de t-shirts avec le logo de la SLOE à 8,75$ et d’autocollants J’observe les oiseaux au prix de 4,50$. En 1990, des difficultés financières obligent le conseil d’administration à augmenter les cotisations à 18$ pour tous les membres; finis les rabais étudiants et pour les familles.
La vision fondatrice de la SLOE se décline en sept objectifs généraux qui sont restés inchangés et que l’on retrouve sur le site Web (www.sloe.net), sous l’onglet Mission. Ce qui est remarquable, c’est que les personnes qui fondent la SLOE choisissent le terme «loisir» comme porte d’entrée à toutes les dimensions de l’ornithologie : l’acquisition et la diffusion de savoirs pratiques et scientifiques, l’aspect social pour les membres et l’interaction entre les régions, l’éducation du grand public et de la jeunesse ainsi que la protection et la conservation des oiseaux, notamment leurs aires de reproduction, de passage migratoire et de repos et leurs habitants en toute saison.
Au cours des dix premières années de la SLOE, tous ces objectifs se concrétisent dans plusieurs actions et initiatives qui trouvent encore un écho aujourd’hui. Par exemple, en plus de la publication du bulletin Le Jaseur, plusieurs actions sont reliées aux objectifs relatifs à l’initiation et à la connaissance ornithologiques :
en 1981, le lancement du recensement de Noël avec le club St-Francis de Lennoxville ainsi que l’enregistrement des observations d’oiseaux sur des feuillets EPOQ qui, fait à noter, sont vendus 0,60$ la douzaine et 4,50$ la centaine;
en 1986, début de conférences et d’ateliers sur la construction de nichoirs et sur les aménagements favorables à l’accueil des oiseaux donnés à la Maison de l’eau du réseau Charme de Sherbrooke;
en 1988, l’organisation d’un congrès réunissant quelque 300 ornithologues amateurs du Québec, de l’Ontario et même de la Belgique;
en 1989, la compilation de plus de 3000 feuillets EPOQ sur le premier ordinateur de la SLOE, acheté en 1987, et la transmission de ces données à eBird; en passant, ces précieuses données servent à la rédaction du 1er Atlas des oiseaux nicheurs du Québec;
en 1991, le début de la présentation de série de conférences avec des invités experts de l’extérieur de l’Estrie;
la même année, l’obtention d’une subvention de 30 000$ du ministère de l’Enseignement supérieur et de la science pour la conception d’un guide des sites ornithologiques de l’Estrie.
Parmi les points forts de l’activité ornithologique de la SLOE, on compte les nombreuses sorties d’observation des oiseaux en Estrie, mais aussi dans d’autres régions du Québec, comme le parc national de la Mauricie, l’île d’Anticosti, Rimouski, l’île aux Basques, l’île aux Lièvres, Saint-Étienne, Sainte-Martine, Beauharnois, le lac Boivin, la Réserve nationale de la faune de Cap-Tourmente, le parc national de Plaisance et l’incontournable parc national de Pointe-Pelée. Pour attiser l’intérêt des ornithologues, en 1989, la création du réseau RICOCHE assure la communication rapide des observations d’oiseaux rares vus au Québec et en Estrie, grâce à sa chaine téléphonique efficace.
Les objectifs de protection et de conservation des oiseaux ne sont pas en reste; plusieurs actions majeures sont mises en œuvre. Parmi celles dont la SLOE est particulièrement fière, mentionnons la préservation de l’île du marais de Kateville où nichent une grande variété d’oiseaux, mais qui est abandonnée depuis une vingtaine d’années. Grâce à l’engagement sans réserve d’André Cyr avec d’autres organismes, l’île du marais de Kateville devient, en 1984, un site du Patrimoine naturel de la région et une aire de conservation. Par la suite, en 1985, la SLOE commence à recevoir des subventions gouvernementales pour plusieurs projets qui ont permis l’embauche d’étudiants, dont l’aménagement de sentiers à l’île du Marais et plusieurs voyages d’exploration dans le nord du Canada pour la compilation de données d’observation d’oiseaux. Ces projets sont suivis, en 1986, par l’installation de 103 nichoirs sur la piste cyclable entre Lennoxville et North Hatley pour soutenir la reproduction du Merlebleu de l’Est.
Cette première décennie est marquée par une effervescence tous azimuts pour bien mettre la SLOE sur ses rails, en lien avec chacun de ses grands objectifs. Les renseignements recueillis sur cette période permettent de dire : « Mission accomplie! » C’est le moment de souligner cette première tranche d’existence de la SLOE par la conception d’un nouveau logo et pour André Cyr de boucler son engagement dans les conseils d’administration et de passer le relai aux suivants.
Deuxième décennie : turbulence, consolidation et visibilité numérique
La première moitié de la décennie 1992-2001 est marquée par quelques turbulences. En 1993, les quatre membres de l’équipe du bulletin Le Jaseur démissionnent et, en 1994, tous les membres du conseil d’administration se retirent. Seulement trois nouveaux membres prennent la relève. Rapidement, une assemblée générale spéciale est convoquée afin de pourvoir les sept postes restés vacants.
Néanmoins, au cours de cette période, ces événements n’empêchent pas le lancement de deux ouvrages importants : Le guide des sites ornithologiques en Estrie par Denis Lepage en 1993 et en 1995, le premier Atlas saisonnier des oiseaux du Québec (1969-1989) par André Cyr et Jacques Larivée. De plus, soucieuse de bien accueillir ses nouveaux membres, la SLOE produit sa première trousse de bienvenue en 1994, une belle initiative encore en vigueur aujourd’hui. Cette année est aussi l’occasion de lancer une activité conviviale pour rapprocher les membres : les Soupers migratoires. Enfin, soulignons qu’en 1996, la SLOE fête ses 15 ans par un voyage organisé à la Réserve nationale de la faune de Cap-Tourmente, lieu de prédilection pour l’observation de l’Oie des neiges en pleine migration.
Au cours des cinq années suivantes, la SLOE consolide ses actions. Les nombreuses sorties d’observation, les Soupers migratoires et la publication du bulletin se poursuivent à un rythme régulier. Les projets spéciaux qui se multiplient en attestent largement :
la préservation du marais Kingsbury où le marais et une héronnière sont gravement menacés par la construction d’une ligne à haute tension d’Hydro-Québec. Après moult démarches et pressions, le marais est épargné, mais pas la héronnière;
la collaboration avec les sentiers de l’Estrie, l’inventaire de la population des Plongeons huards sur les lacs de notre région et la consultation avec la Ville de Sherbrooke sur l’aménagement du boisée Beckett dans le respect des habitats fauniques;
la première démonstration de l’UQROP à Sherbrooke avec une Crécerelle d’Amérique et un Hibou des marais ainsi que l’envolée d’un Épervier brun;
l’achat d’un terrain à Martinville pour installer une volière à Balbuzard pêcheur en collaboration avec le ministère de l’Environnement et de la Faune. La compagnie Shell Canada participe aussi au financement de l’aménagement du territoire et la plantation de poteaux qui aboutissent à la construction de la volière en 2001. Malheureusement, le projet se termine abruptement et le solde des subventions est transféré à l’UQROP qui l’utilise pour construire un réseau d’apport d’eau et de drainage pour alimenter de petits bassins d’eau dans les huit petites volières du complexe de réhabilitation.
La dernière année de cette décennie amorce une ère où la communication grand public prend son envol : la création du premier site Web de la SLOE www.sloe.org et sa première adresse courriel : sloeoiseaux@hotmail.com. Ces initiatives mettent fin au projet RICOCHE qui n’a plus sa raison d’être avec les envois massifs de courriels et la connexion à l’Internet pour obtenir l’information sur les espèces rares. André Cyr participe à l’émission 1-888-oiseaux animée par Marie-Josée Lavoie à titre de chroniqueur régulier. Serge Beaudette, ornithologue très connu dans la région, offre une chronique régulière à la radio CFLX (95,5) et ses premiers cours d’ornithologie pour débutants, lesquels se prolongent sur plusieurs années.
Voilà qui conclut la première tranche d’histoire de la SLOE. D’ici la présentation de la deuxième période dans Le Jaseur de l’automne 2021, ne serait-il pas intéressant de partager avec vos collègues de la SLOE vos anecdotes, vos compléments d’information, votre vision personnelle? Faites-nous part de vos commentaires!